Il la ramène : "Regarde-moi ça, on-on-on fait des trucs tr-trop de dingues, t'as vu." Il se revendique de la communauté gitane et il traîne sur Skyrock juste à côté de moi. Il me dit qu'avec son cousin, ils font des supers vidéos. Ils s'auto-proclament "Les fou du cartier". Tiraillée entre mon désir éternel d'être polie et celui plus égoïste de regarder l'interview d'Edwy Plenel, je succombe à mon élan de générosité et mate assidûment les vidéos de ce garçon qui joue à Yamakasi sur les trottoirs de la Paillade sur un fond de rap ringard. Et puis je finis par lâcher l'affaire. Lui aussi. Il reprend son activité première : trouver des meufs avec Skyblog. J'entends des murmures de "salope" et compagnie à chaque fois qu'il change de profil. Je n'en dis rien. Tout à coup, cri du coeur, il commente la page d'une petite minette maquillée jusqu'au nombril : "Cherche mecs et nanas". Un trop-plein pour lui, il ne peut s'empêcher de me mettre au courant "C'est trop une folle, la meuf. Grosse sa-sa-salope quand même." Obligée de répondre, mine de rien, derrière son bégaiement : "Pourquoi ?" Une réponse attendue, on ne se refait pas : "Ben-ben elle chercher un mec ou-ou-ou une nana" Je joue la carte de la niaiserie, pour ne pas trop le brusquer : "Et alors ?" - "Ben, comment on app-pp-elle ça déjà ? Elle est-elle est-elle est-bi. C'est dégueulasse"
Expliquer à un minot de 18 ans ( "Eh, je suis né juste un an après toi-toi-toi. Ouais." ) que l'attirance sexuelle est toute relative et que l'on se doit de la respecter quelle qu'elle soit, sans qu'il se braque, c'est transformer son stage audiovisuel en un stage social. Et c'est bien aussi, après tout.
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